On n’en sait jamais assez trop sur le trot
Dans le cadre des « Dimanche Plaisirs » (voir ici) jusqu’au 23 février 2025 à l’hippodrome de Paris-Vincennes, des visites guidées des écuries sont proposées. L’occasion de (re)découvrir l’univers des courses de trot.
La deuxième course du jour sur les dix que comporte la réunion vient de se terminer. Le vainqueur, Versace Face, a bouclé les 2 100 mètres en 2’30 minutes, soit une vitesse moyenne supérieure à 50 km/h.
Les chevaux ne s’attardent pas sur la piste cendrée de l’hippodrome (réalisée en mâchefer, un matériau qui lui donne cette couleur noire et ce surnom). Après l’effort, ils s’en vont très vite prendre une douche tiède. « Notre angoisse, c’est qu’ils attrapent froid » affirme Sandrine, chargée des remises de prix mais également de la visite des écuries.
La douche au Paic Citron
Le cheval est lavé avec du Paic Citron, « c’est ce qui dégraisse le mieux ». Un couteau de chaleur est utilisé pour l’essorer et accélérer le séchage. Après cette étape on lui place une couverture sur le dos. Place ensuite à la récupération dans ce qu’on appelle le rond de détente. « Le cheval va marcher durant environ 30 minutes pour que le rythme cardiaque redescende bien ou qu’un muscle ne soit pas tétanisé après l’effort » explique la spécialiste. Lors de la douche et de la phase de récupération, un assistant vétérinaire s’assure qu’il n’y ait pas de manipulations qui pourraient fausser le contrôle anti-dopage qui intervient juste après.
On ne triche pas avec le contrôle anti-dopage
Cette étape est un impératif. Le gagnant de chaque course est systématiquement contrôlé. Pour l’épreuve du quinté, ce sont les cinq premiers. Les chevaux peuvent aussi être contrôlés par tirage au sort. Le service vétérinaire dispose de boxes un peu plus grands et un peu mieux paillés (davantage pourvus en paille). Outre une prise de sang, tout l’enjeu est de faire uriner le cheval, « rien de plus simple, on siffle » signale Sandrine, « et ça marche relativement bien ». Tout est ensuite consigné dans le livret signalétique, la carte d’identité du cheval, où figurent aussi ses vaccinations qui bien sûr doivent être à jour.
« Très sociable », enchainant souvent une vie en club hippique ou en centre équestre après sa carrière sportive, le trotteur apprécie aussi avoir « un doudou » avec lui dans son box. « Naguère c’était un lapin, malheureusement trop se sont fait écraser, aujourd’hui la mode est plutôt à la biquette » raconte celle qui montait déjà sur un cheval avant de savoir marcher.
Un box vous est alloué, un scellé le garantit
Etendu sur 40 hectares, l’hippodrome de Paris-Vincennes comporte 150 boxes. « Quand vous êtes retenu pour la course, vous avez un box qui vous est alloué » déclare Sandrine précisant que « le nom qui est noté est toujours celui de l’entraineur, jamais celui du propriétaire, encore moins celui du cheval afin d’éviter les actes de malveillance ». Elle explique aussi que « lorsque l’entraineur et le cheval arrivent, un scellé garantit que le box est paillé sainement. Tout relève ensuite de sa responsabilité ».
Pour pouvoir concourir à Vincennes ou ailleurs, les chevaux doivent passer une qualification, « effectuer 2 000 mètres dans un chrono défini en fonction de leur âge ». S’ils satisfont à cette exigence, ils peuvent commencer leur carrière de course. Avec le Graal pour tout propriétaire, gagner le Prix d’Amérique qui se déroule chaque année le dernier dimanche de janvier.
En général, un cheval peut concourir de 2 à 11 ans. Un propriétaire consciencieux ne lui fait pas faire plus d’une vingtaine de courses par an. En compétition les trotteurs ne doivent bien sûr pas galoper au risque d’une disqualification, « ils ont droit à 15 foulées maximum entre l’arrivée et le départ ».
Attention au galop et aux coups de cravache
En course, les commissaires de course font également très attention aux coups de cravache. Un usage abusif peut là-aussi entrainer une sanction, parfois une mise à pied. « Nous sommes aujourd’hui sur le bien-être équin. On fait très attention à tout cela. Sur une course de trot monté, le bout de la cravache c’est de la mousse. Quant aux drivers sur le sulky, ils tapent souvent sur le brancard pour stimuler le cheval. Parfois on lui enlève aussi les bouchons en mousse qu’il a dans les oreilles » argumente celle qui travaille pour le compte du GTHP (Groupement technique des hippodromes parisiens).
Autre particularité, les femelles, « plus affûtées » peuvent s’avérer supérieures aux mâles en course. De même, comme les humains, certains chevaux sont plutôt droitiers alors que d’autres sont des gauchers. De là dépend aussi leur capacité à mieux tourner sur un hippodrome corde à gauche (lorsque le sens des virages est à gauche) ou à droite.
Côté matériel, le sulky, cette voiturette légère à deux roues, pèse environ 15 kilos pour un coût moyen de 5 000 euros. À la fin de chaque course, il est systématiquement nettoyé dans un espace spécifique. Là-encore le Paic Citron est utilisé. « Si cette marque résiste, c’est en partie grâce à nous » s’amuse Sandrine.
Deux travaux intensifs par semaine
Au niveau de l’entrainement, les chevaux sortent quotidiennement de leur box, histoire de garder le moral et conserver leur musculature. Ils effectuent en moyenne deux travaux intensifs par semaine. Cela correspond maximum à 25 minutes d’effort. Le principal centre d’entrainement, le domaine de Grosbois, est situé sur la commune de Boissy-Saint-Léger dans le Val-de-Marne.
La filière trot et galop emploie en France 40 000 emplois directs et indirects. Concernant le nombre d’hippodromes, « il y en a autant que de jours dans l’année » conclut Sandrine. Du simple champ agricole transformé une fois par an en un hippodrome éphémère (comme à Valognes dans la Manche chaque jeudi de l’Ascension) au temple du trot comme à Vincennes, ou encore à Longchamp pour le galop. Un univers, une passion.