« Nous voulons reprendre notre métier »
Lors d’une visioconférence organisée le 17 février par le réseau d’agences de voyages Cediv, une centaine de parlementaires et acteurs du tourisme étaient réunis autour de la députée de la Sarthe Pascale Fontenel-Personne afin d’évoquer la relance de l’économie touristique matérialisée notamment par la mise en place d’un passeport sanitaire. Décryptage.
« Le passeport sanitaire, dont on me parle depuis septembre dernier, il faut tout de suite penser à sa création ». C’est en substance le message martelé par la députée Pascale Fontenel-Personne qui préside le groupe Tourisme à l’Assemblée Nationale. Plus qu’une nécessité, une urgence à l’heure où beaucoup d’entreprises sont en grande souffrance, certaines ayant même dû cesser leur activité. « Nous ne voulons pas continuer à être perfusés, nous voulons reprendre notre métier » formule très bien Adriana Minchella, présidente du Cediv riche de ses 215 points de ventes.
Ne nous méprenons pas sur les termes, Pascale Fontenel-Personne ne veut pas entendre parler de passeport vaccinal mais bien de passeport sanitaire. Les Entreprises du Voyage (EdV) et le Seto (Syndicat des Entreprises du Tour Operating), entités représentant les agences de voyages et les tour-opérateurs, évoquent quant à eux la mise en place d’un « certificat sanitaire digital » qui pourrait être facilement consulté, sous la forme d’un QR Code. Quel que ce soit le nom, le document doit concerner aussi bien les Français se déplaçant à l’étranger que les étrangers venant sur notre territoire, « nous avons besoin de ces derniers pour faire vivre notre économie touristique et l’économie française » rappelle la députée sarthoise.
Faire des propositions et médiatiser « l’affaire »
Aidée et relayée par plusieurs parlementaires, Pascale Fontenel-Personne veut sur la question « inventorier le champ des possibles », médiatiser « l’affaire » et « faire des propositions d’ici la fin mars » en vue d’une « harmonisation européenne du passeport sanitaire en septembre ». « Je ne suis pas de ceux qui disent qu’il faut attendre (…). Il faut faire de la prévention si on veut repartir rapidement » ajoute encore l’élue.
Des questions sans réponse pour le moment se posent. Comment va-t-on traiter les gens qui ne seront pas vaccinés, qui ne pourront l’être ou qui en seront dispensés. « Cela me parait difficile de dire à des Français, vous ne voyagerez pas si vous n’êtes pas vaccinés » explique Pascale Fontenel-Personne consciente que lorsque « les portes de la liberté vont se rouvrir, nous ne serons pas tous vaccinés ».
En attendant, le passeport sanitaire sonne comme une évidence. D’autant plus, comme le souligne Richard Soubielle, PDG d’Alest Voyages et cheville ouvrière au sein des EdV, que « les compagnies aériennes travaillent aussi sur le sujet » avec notamment « des entreprises qui ont besoin pour leur économie de faire voyager leurs collaborateurs ». « Très mobilisée » sur la question des stations de montagne, et présente elle aussi lors de la réunion Cediv, la députée savoyarde Emilie Bonnivard insiste sur « l’urgence » de ce passeport sanitaire pour « être au rendez-vous de la prochaine saison ». « Comme nous avons une activité saisonnière, si nous manquons une saison, nous manquons une année, voire deux » précise-t-elle.
Le passeport sanitaire, Sophie Bigot, gérante d’Esprit Voyages à Rouen, y crois. Tout comme Anne-Sophie Lecarpentier, directrice générale de Périer Voyages en Normandie, ou encore Jean Geneyne à la tête de l’agence événementielle SLV Events (voir le témoignage ci-dessous). Alors qu’une décision tarde à arriver, les Français interrogés y sont favorables également. C’est ce que révèle un sondage mené l’institut Poll Roll pour le spécialiste du voyage sur mesure Worldia en janvier dernier. En effet, près de 64% des personnes interrogées affirment qu’elles se feront vacciner si le passeport (vaccinal) sanitaire devenait obligatoire. « Cela va dans le bon sens car nous vaccinons de plus en plus » résume Pascale Fontenel-Personne déterminée à mettre en place le précieux document. Comme pour les masques de sport, les professionnels, qu’ils soient du sport ou du tourisme, veulent que ça avance. Et vite. Il y va de leur salut entrepreneurial et peut-être même de leur existence tout court.
« On fait et défait des évènements, c’est notre quotidien »
« Chaque année, nous envoyons des milliers de personnes en séminaire, convention, incentive…, que ce soit en France, en Europe ou à l’autre bout du monde ». En 2019 SLD Events a réalisé un chiffre d’affaires de 2,8 millions d’euros, sans oublier la création de six emplois depuis 2015.
Depuis mars 2020, tous nos clients ont annulé leurs voyages. Certains évènements ont été reportés jusqu’à quatre fois. Je cite volontiers l’exemple d’un groupe de 150 personnes, un constructeur de poids lourds que l’on devait emmener au Mexique en mars 2020. Le voyage a été reporté en novembre 2020, puis en mars 2021, et maintenant il est programmé pour décembre 2021. Idem pour un challenge national d’experts comptables – 250 personnes – qui se tient à Megève chaque année. Annulé en mars 2020, il est reporté en mars 2021 avec toute l’incertitude que l’on connaît.
La gestion des reports, des avoirs, des fournisseurs, compagnies aériennes, hôteliers… c’est très très dur. En portefeuille, j’ai des conventions qui doivent se tenir en France mai-juin, je ne sais pas si elles auront lieu. Bref on fait et on défait des évènements, c’est notre quotidien. Les dégâts sur le moral des équipes sont incommensurables. Nous sommes dans un épais brouillard sans aucune perspective. Heureusement que nous avons perçu des aides qui ont permis de préserver nos équipes et justifier des années de travail. Nous demandons à nos élus de continuer à nous soutenir et à soutenir l’emploi de la filière évènementielle. Le passeport sanitaire, j’adorerais qu’on y arrive ».
Jean Geneyne à la tête de l’agence événementielle SLV Events située dans le Grand Lyon.