La fureur de vivre
Les dernières décisions du gouvernement pour lutter contre la propagation du virus ne sont pas vraiment rassurantes dans l’optique d’un retour rapide à une vie sans couvre-feu ou attestation même si l’on grignote, ici et là, quelques mètres de liberté. C’est bien difficile de s’en contenter mais on les prend quand même avant la piqûre libératrice.
Dès le 15 décembre, on pourra de nouveau voyager. Un Parisien pourra s’oxygéner en Bretagne et un Bordelais s’essayer au ski de randonnée dans les Pyrénées. On retrouve le droit de se rendre dans l’une des soixantaines de destinations qui ont l’amabilité de bien vouloir nous accueillir, avec ou sans tests. On pense, bien sûr, aux Dom Tom – les prix des billets d’avion sont plus bas en moyenne que l’année dernière – où l’on peut même retrouver le plaisir d’aller au restaurant. Pour plus d’exotisme, on peut même s’envoler pour Tahiti, les Maldives, la Tanzanie.
A partir du 15 décembre, toujours, on va pouvoir faire du sport en extérieur sans avoir besoin de remplir son attestation avec, toutefois, l’obligation de respecter un couvre-feu. Pas grave, l’hiver, à 20 heures, on est très bien chez soi. On tient le bon bout ! Le vaccin Pfizer passe crème en Grande-Bretagne, à une ou deux exceptions près. Elle est pas belle la vie ?
Non, car le 15 décembre, il ne sera toujours pas possible de se rendre dans un stade ni dans un cinéma. Pour le foot, devant sa télé, on va oublier l’improbable chaîne Mediapro et retrouver sans doute Canal Plus avec ses journalistes privés de leur liberté d’expression par le leader suprême Kim Bolloré-un. Pas grave, la radio est un excellent média pour suivre un match. Il nous sera toujours interdit de rendre visite à New York à la Statue libérée de Donald Trump ni héler un Tuk-tuk à Bangkok.
On aurait bien fait quelques sacrifices pour dévaler les pentes à Noël mais, voilà, le Conseil d’Etat a débouté les collectivités territoriales qui cherchaient à invalider la décision du gouvernement de fermer les remontées mécaniques. Et, on n’est quand même pas très nombreux, déjà en temps normal, à pouvoir s’offrir un séjour aux Maldives, d’ailleurs très peu adaptées à la pratique du ski alpin.
Ne parlons pas des piscines et des salles de sport qui deviennent déjà presque un souvenir lointain. Et pour la bière au comptoir avec les copains de suée, après la sortie en vélo, on fait comment ? Et Sanofi qui ne réussira pas à produire un vaccin fiable avant au moins six mois ? Y-aura-t-il des doses pour tout le monde avant l’été ? Elle est bien triste, cette vie et, même si on regarde avec stress le verre à moitié vide, on reste optimiste. Buvons-le tout doucement et on finira bien par nous administrer une piqûre non pas pour achever nos souffrances mais bien pour accompagner notre fureur de vivre.