Nous n’irons pas skier à Noël
Ce n’est pas le titre d’un film mais bien le constat d’une dure réalité. Les Français ne pourront pas skier à l’occasion des fêtes de fin d’année. Ainsi en a décidé le 24 novembre le président de la République Emmanuel Macron partisan de « privilégier une réouverture des stations courant janvier dans de bonnes conditions ».
Pour les acteurs de la montagne, le coup est dur. Les stations, environ 350 en France pour environ 120 000 emplois saisonniers, devront patienter à minima jusqu’à janvier pour pouvoir ouvrir leurs portes. Certes, une concertation avec les pros du secteur est toujours en cours, mais aujourd’hui il semble acquis que les domaines skiables ne pourront pas accueillir de public d’ici la fin de l’année.
« Vous autorisez l’ouverture d’établissements en lieux clos mais pas la pratique du ski, activité de plein air par excellence. Vous autorisez les déplacements entre régions pour passer Noël en famille, mais pas en station. Vous évoquez une coordination européenne alors que les stations suisses sont ouvertes et les italiennes resteront fermées jusqu’en février » s’indigne par voie de communiqué l’Agence de Développement des Hautes-Alpes (voir ci-dessous).
« Un déni de démocratie »
Sur son compte Facebook, Alexandre Maulin, président de Domaines skiables de France (syndicat national des gestionnaires de remontées mécaniques), s’est fendu d’un véritable coup de gueule à l’encontre des autorités. « Comment monsieur Jean Castex peut réunir tous les professionnels du tourisme pour travailler sur la saison de ski et nous annoncer une réponse sous 10 jours, et que le président Emmanuel Macron puisse nous annoncer que nos espoirs sont nuls » écrit-il. Et d’ajouter, « savez-vous à quel point les stations ont travaillé sur des mesures sanitaires uniques à l’échelle de nos territoires pour faire des stations des lieux exemplaires ». Pour le dirigeant, c’est clairement « un déni de démocratie ».
« Tout s’écroule pour nous »
Un sondage très récent de Ginkoia, éditeur de logiciels pour le commerce de sport, indique 10% des personnes interrogées (chiffre stable par rapport à l’an dernier) envisagent de partir au ski cet hiver en dépit du contexte actuel. 42% d’entre eux avaient l’intention de skier avant ou pendant les vacances de Noël. Malheureusement ils ne pourront sans doute pas le faire sur leur propre territoire. Triste ! « On avait travaillé à mettre en place un protocole sanitaire qui nous paraît pertinent. Et là c’est une douche froide. Tout s’écroule pour nous » déclare sur les ondes de France Info Pierre Balme, président de l’association des maires des stations d’Isère, et par ailleurs administrateur de l’association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM).
Jean-Luc Boch, le président de l’ANMSM qui fédère aujourd’hui une centaine de stations de montagne réparties sur les cinq massifs français, rappelle que selon les massifs et suivant les stations « la période de Noël représente entre 20 et 25% du chiffre d’affaires », autrement dit « beaucoup d’argent et beaucoup d’emplois dans des milieux qui, à l’origine sont très défavorisés ».
En vue d’une réouverture en janvier, Emmanuel Macron a dit sa volonté de « se coordonner avec nos voisins européens ». Compliqué au vu de la situation. En effet, les stations suisses sont ouvertes alors que les italiennes resteront fermées jusqu’en février. Si l’Allemagne privilégie une fermeture de ses stations, l’Autriche, elle, hésite. Bref, si l’on peut skier pour les fêtes de fin d’année à Zermatt ou Crans-Montana, on ne pourra pas le faire à Gran Paradisio ou Chamonix. Difficile de voir clair dans cette cacophonie européenne. En attendant, la montagne française ne se résigne pas. Elle va continuer de se battre et espérer rapidement un assouplissement des règles. Souhaitons-le ardemment.
Courrier au chef de l’Etat : les Hautes-Alpes sont anéanties
Monsieur le Président de la République,
Dans votre adresse aux Français du 24 novembre, vous avez jugé utile concernant les stations de sports d’hiver, de préciser qu’il vous semblait « impossible d’envisager une ouverture pour les fêtes et bien préférable de privilégier une réouverture courant janvier dans de bonnes conditions en coordonnant les initiatives avec les Européens ».
Cette intention est difficilement compréhensible.
Vous autorisez l’ouverture d’établissements en lieux clos mais pas la pratique du ski, activité de plein air par excellence.
Vous autorisez les déplacements entre régions pour passer Noël en famille, mais pas en station.
Vous évoquez une coordination européenne alors que les stations suisses sont ouvertes et les italiennes resteront fermées jusqu’en février.
Hier soir, vous avez anéanti des mois de travail entre le gouvernement, les professionnels et élus de la montagne pour construire les protocoles de santé adéquats.
Vous mettez nos territoires de montagne en danger en sous-estimant gravement les conséquences économiques et sociales d’un report d’ouverture en janvier, pour nos communes, nos entrepreneurs et nos salariés majoritairement saisonniers ; jamais l’État ne pourra compenser à sa juste mesure le préjudice tant les stations portent l’économie des Hautes-Alpes.
Les montagnards espèrent, Monsieur le Président de la République, que votre position évolue dans les jours qui viennent.
Que votre décision soit responsable sur le plan sanitaire et économique, juste et compréhensible.
Patrick Ricou, président
Yvan Chaix, directeur
Agence de Développement des Hautes-Alpes