Revente de billets : un marché à réguler d’urgence
Lors d’un débat au Sénat, le 20 mars, Cédric Chevalier, député de la Marne, a exprimé sa préoccupation face à la revente illégale et la spéculation tarifaire des billets pour les événements sportifs et culturels. Fraude, abus, acheteurs floués : la nécessité d’une réforme apparaît comme une évidence.

Acheter un billet des mois à l’avance pour un événement et se retrouver dans l’incapacité d’y assister est une situation relativement fréquente qui soulève une problématique majeure : que faire de ce billet inutilisé ? Un exemple concret est celui du Marathon de Paris, où un coureur, empêché pour raisons médicales, se retrouve dans l’impossibilité de revendre ou même de céder son dossard, même gratuitement (voir ici notre article). Comme l’indiquait récemment l’organisateur de la course, ASO, « aucun remboursement ni transfert de dossard n’est autorisé », obligeant le participant à perdre l’intégralité de son investissement. Cette situation révèle les lacunes d’un cadre juridique insuffisamment adapté à la revente de billets.
Un cadre juridique insatisfaisant
Actuellement, l’article 313-6-2 du Code pénal interdit la revente de billets sans l’autorisation des organisateurs. Si cette mesure vise à lutter contre la fraude et la spéculation, elle empêche également un particulier de revendre légalement son billet à un prix inférieur à sa valeur faciale. Cette interdiction crée un marché parallèle où, faute de solutions officielles, les acheteurs se tournent vers des plateformes non sécurisées, s’exposant ainsi à des risques d’arnaques.
D’un côté, les consommateurs sont privés de leur droit à la revente, et de l’autre, les organisateurs voient leur image entachée par la prolifération de pratiques frauduleuses. Cette confusion rappelle d’ailleurs celle vécue par certains spectateurs des JO 2024, toujours en attente de remboursements pour leurs billets souvenirs, dans un processus semé d’embûches. L’absence de clarté dans cet exemple génère une méfiance générale et souligne l’urgence d’une réforme.
Une évolution nécessaire pour limiter la spéculation et les abus
Face à ces constats, plusieurs pistes sont envisagées. Parmi elles, l’interdiction de la revente à un prix supérieur à la valeur faciale, ainsi que l’empêchement de toute revente avant le lancement officiel de la billetterie. Ces mesures permettraient une billetterie plus équitable et transparente, tout en limitant la spéculation et les abus.
Le projet de loi déposé par Cédric Chevalier met également en lumière la nécessité de développer des mécanismes de revente sécurisés, directement encadrés par les organisateurs. « Plutôt qu’un remboursement ingérable, il faut inscrire un mécanisme sécurisé de revente », insiste le sénateur. Plusieurs acteurs ont déjà mis en place des solutions permettant aux consommateurs de revendre leurs billets de manière encadrée. On peut notamment saluer l’été dernier la mise en place d’une plateforme officielle, « vertueuse et efficace », pour la revente de billets pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Encourager ces initiatives pourrait constituer une alternative viable aux plateformes non officielles. Cela permettrait de limiter les fraudes, tout en garantissant une meilleure gestion des places disponibles et en optimisant le remplissage des événements.
« Notre droit doit évoluer »
Si l’encadrement de la revente de billets est une nécessité, il ne saurait suffire. Un renforcement des sanctions contre la fraude et la spéculation est également indispensable. La traçabilité des billets, la clarté des transactions et la responsabilité des plateformes doivent être intégrées à toute évolution législative. « Sans ces garde-fous, le risque est d’aggraver le problème », avertit Cédric Chevalier.
En lançant ce débat, le sénateur propose une réflexion transpartisane pour protéger à la fois les consommateurs et les organisateurs. « Notre droit doit évoluer », affirme-t-il, appelant à des solutions équilibrées et applicables. La question n’est plus de savoir s’il faut agir, mais comment le faire de manière efficace et équitable.
« Il faut intervenir sur ce sujet. D’autant plus que 42% des Français de moins de 35 ans se déclarent coutumiers de ces pratiques », acquiesce Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire. Cette dernière se dit « tout à fait favorable à engager un dispositif de concertation, de dialogue entre les organisateurs, les plateformes et les parlementaires ». Affaire à suivre, donc.