Et si le Covid pesait sur les Jeux de Paris en 2024
Auditionné par la Commission de la culture, de l’éducation et de la communication au Sénat, Tony Estanguet, président du Comité d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (COJOP) de Paris 2024, est venu faire un point d’étape sur ce grand évènement. Et notamment, contexte oblige, de dissiper les craintes de certains élus sur l’équilibre budgétaire de ces JO qui doivent se tenir du 26 juillet au 11 août 2024.
Laurent Lafon, président de la Commission de la culture, de l’éducation et de la communication au Sénat, l’affirme dans son introduction : « la crise sanitaire complique l’équilibre budgétaire des JO 2024 ». Et celui-ci de s’interroger sur « l’implication économique des sponsors qui jouent un rôle déterminant dans le financement de ce grand évènement ».
Les négociations avec des entreprises partenaires continuent
A l’aise et concis, Tony Estanguet est venu d’abord rappeler que « le sport est un vrai outil au service des Français » et que les JO de Paris, « le plus grand évènement jamais organisé en France, constituent un véritable accélérateur pour faire bouger les lignes ». Pour mener à bien son projet, le Comité d’organisation dispose d’un budget global de 3,9 milliards d’euros, financé à 97% par des recettes privées. Ce budget intégrant tous les aspects liés à la bonne tenue de la manifestation (aménagement et fonctionnement des sites, organisation des compétitions, accueil des délégations, hébergement et transport des athlètes, sécurité des lieux de compétition…) se divise peu ou prou en trois grandes parties : 1,2MdE pour la contribution du CIO ; 1,3 MdE pour la billetterie et les produits dérivés ; et 1,2 MdE pour les entreprises partenaires.
Sur cette dernière partie, des sénateurs, tel Jean-Jacques Lozach, sénateur de la Creuse et rapporteur pour avis des crédits du sport, qui se demande si la crise sanitaire ne remet pas en cause certains projets de partenariats. « A la fin de l’année 2020, nous avons sécurisé 53% de nos objectifs, soit à peu près le même pourcentage que Londres en 2012 à la même période » lui répond Tony Estanguet. Celui-ci espère « sécuriser deux tiers des revenus liés aux entreprises partenaires à la fin de cette année, et ce indépendamment de la crise ». Le président du COJOP œuvre « sur les négociations avec des entreprises qui restent intéressées parce que ces Jeux constituent une plate-forme unique et très attractive ». Continuant « d’avancer sur les prévisions initiales », Tony Estanguet sur ce sujet « ne veut pas tirer le signal d’alarme ».
Réflexions sur le modèle de billetterie
Autre interrogation, celle concernant la billetterie, « on commence à regarder ça de près » résume Tony Estanguet qui suit de très près ce qui se fait du côté de Tokyo qui, rappelons-le, a récemment interdit la présence de spectateurs internationaux. Avec bien sûr les conséquences que l’on connait, notamment auprès d’Eventeam, l’agence de billetterie officielle pour ces JO de Tokyo. S’il est « trop tôt pour arrêter un modèle de billetterie », le président du COJOP est aussi conscient que « si on réduit le nombre de spectateurs, on réduit aussi un certain nombre de dépenses, sur la sécurité, les transports, la restauration… ». Un mal pour un bien en quelque sorte.
Aujourd’hui le Comité d’organisation table sur un taux de remplissage de 85%, une hypothèse prudente sachant que les grandes compétitions internationales organisées en France ont en moyenne enregistré un taux de 95%. « Avec notre comité d’audit qui se réunit tous les mois, nous travaillons sur une cartographie des risques. En fonction de l’évolution de la situation sanitaire, nous avancerons sur différents modèles » précise Tony Estanguet qui reste toutefois sur « une hypothèse enthousiaste ». Alors, « est-ce qu’en 2024 les gestes barrières seront devenus inutiles ou au contraire faudra-t-il les maintenir dans les stades » s’interroge le sénateur du Val-de-Marne Lafon. Difficile de le dire mais je pense qu’il faut s’y préparer.
Trois grands défis pour la réussite des Jeux
Pour Tony Estanguet, la réussite des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris repose sur trois grands défis : « Réussir une célébration spectaculaire, ouverte et responsable », « Construire un héritage collectif », et « Engager l’ensemble des Français et des territoires dans la réussite de cet évènement ». Sur le premier défi, le président du COJOP estime qu’à « l’exemple du Stade de France, nous avons la chance de pouvoir capitaliser sur des sites iconiques qui ont fait leurs preuves lors de l’accueil de grands évènements ». Une opportunité également pour mettre en avant « notre plus beau patrimoine » avec notamment « des épreuves au pied de la Tour Eiffel, des Invalides, place de la Concorde, dans les jardins du château de Versailles… et même à Tahiti qui possède la plus belle vague du monde pour le surf ».
Concernant le deuxième défi et l’héritage de ces Jeux, Tony Estanguet rappelle l’ambition de « diminuer par deux les émissions carbone en s’appuyant sur 95% d’infrastructures existantes ou temporaires ». Cet héritage collectif des Jeux doit bien sûr profiter aux Français et faire en sorte qu’ils fassent davantage d’activité physique. Ce qui est loin d’être gagné lorsqu’on voit certains députés décrire « la situation cataclysmique » dans laquelle se trouve le sport français au regard de cette crise sanitaire. Il faut que cela change car en matière de sport, chacun en est convaincu, le bénéfice est largement supérieur au risque.
Enfin le troisième défi se donne pour mission d’engager l’ensemble de la population et les territoires nationaux. Le label « Terre de Jeux 2024 » illustre parfaitement cette ambition de Paris 2024 de faire vivre l’énergie des Jeux partout en France afin de renforcer la place du sport dans notre pays. Pour rappel ce label, censé faire rayonner la diversité territoriale, permet d’impliquer et de rassembler le mouvement sportif (fédérations, clubs sportifs) et les collectivités territoriales (villes, intercommunalités, métropoles, départements, régions). A ce jour quelque 1 300 territoires répartis sur 90 départements ont obtenu le label « Terre de Jeux 2024 ». « Il y a 25 millions de Français qui vivent dans une collectivité Terre de Jeux » rappelle Tony Estanguet. De même dans la perspective de cette 33ème olympiade, Paris 2024 a déjà retenu 624 Centres de Préparation aux Jeux (CPJ). « Avec les quatre sports additionnels (Ndlr : breakdance, skateboard, escalade et surf), il reste encore des opportunités pour être désigné CPJ » ajoute enfin Tony Estanguet.
Paris 2024 en quelques chiffres
- 15 000 athlètes accueillis en provenance de 206 pays.
- 32 disciplines (22 pour les Jeux Paralympiques).
- 50 000 volontaires.
- 13,5 millions de spectateurs.
- 4 milliards de téléspectateurs.
- 2 000 journalistes accrédités.